Vente
ART CONTEMPORAIN ET ÉLECTISME : DE L'ASIE À PIERRE SOULAGES





Le 6 avril 2023 à Neuilly-sur-Seine, Aguttes dévoile, à l’occasion de sa vacation « Art contemporain », un bel ensemble d’œuvres de Pierre Soulages ou encore de Gérard Schneider. Coup de projecteur sur la scène asiatique : figurent également au catalogue Chu Teh-Chun ou encore Kim Tschang-Yeul.


Hommage à Pierre Soulages : un ensemble de 9 œuvres sur papier
« J'ai fait de la gravure parce que, avec la gravure, quelque chose apparaissait ; quelque chose qui ne pouvait apparaître dans la peinture. »
Pierre Soulages



Pierre Soulages (1919-2022)
Eau-forte XXXII, 1974
Eau forte sur papier vélin
Épreuve d'artiste signée en bas à droite
76.5 x 56.5 cm
Provenance
Collection privée en région Parisienne
Bibliographie
PIETRZYK Estelle, RAGON Michel, DUPUIS Gilbert ; Soulages le temps du papier ; Catalogue de l’exposition au musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg (MAMCS), 31 octobre 2009 - 3 janvier 2010 ; Éditions Cercle d'Art, Paris, 224 pages. Œuvre répertoriée et reproduite.
Estimation: 25 000 - 40 000 €



Peintre du noir et de la lumière, Pierre Soulages (1919 - 2022) se faisait rare en salles des ventes alors que plus de 110 musées, sur tous les continents, présentent son travail. Ses œuvres, formées de larges tracés sombres, aux galbes riches de sens, affirment l’étonnante simplicité de l’artiste. Le maître s’est imposé comme une figure majeure de l’abstraction dont les compositions suscitent toujours la curiosité.
Particulièrement connu pour ses grandes toiles d’outre noir, profondes et vibrantes, cet artiste peintre et graveur français a réalisé un travail tout aussi remarquable sur la technique de l’eau forte, et ce médium représente même un aspect plus intime et plus personnel de sa carrière. Encouragé par son ami Hans Hartung, il découvre cette technique dans les années 1950 à l’atelier Lacourière à Paris. 
Un ensemble de 9 estampes provenant de trois collections différentes, estimées de 15 000 à 25 000 €, témoigne de l’importance de ce pan dans l’œuvre de l’artiste. Ses eaux fortes laissent transparaître sur papier la quintessence de la morsure de l’acide sur le métal, et revêtent un aspect presque sculptural. Les trous dans la plaque de cuivre façonnent et transforment ces gravures en une forme abstraite. Pour Soulages, imprimer une forme rectangulaire sur un papier rectangulaire revient à un pléonasme qu’il cherche à bannir. L’acide crée des formes « fortuites », dont l’existence naît de la main de l’artiste comme une aventure puisque c’est le hasard qui la guide.




L’abstraction lyrique célébrée par deux œuvres de Gérard Schneider
Gérard Schneider (1896 - 1986), rattaché au courant de l’abstraction lyrique et proche des cercles surréalistes, fait partie des pionniers de l’abstraction en Europe. Détachant cette dernière de toute référence au monde réel perceptible, il expérimente une peinture esthétique et radicale. Ami sincère de Georges Mathieu, d’Hans Hartung et de Pierre Soulages, il expose rapidement ses œuvres à l’international sur les mêmes cimaises que celles de ces trois grands noms. Et dès 1950, il enchaîne les expositions dans des galeries plus prestigieuses les unes que les autres.




Gérard Schneider (1896-1986)
Opus 86 K, 1974
Acrylique sur toile, signée et datée en bas à droite, titrée au dos
65 x 81 cm
Provenance
Vente VAEP Marie-Françoise Robert-Franck Baille, Drouot Richelieu, 27/11/2006, lot n°53.
Collection privée, région parisienne.
Estimation: 20 000 - 30 000 €




Estimée 20 000 / 30 000 €, cette composition abstraite de 1974, aux dominantes bleues, jaunes et magenta, aussi équilibrée qu’élégante, illustre le travail de recherche de Schneider. En quête d’un esthétisme abstrait et poétique, l’artiste offre, ici, une liberté du geste totale, traduite par l’éclatement des couleurs. Cette énergie renouvelée marque le tournant d’après-guerre.
Avec une estimation à 8 000 / 12 000 euros, Sans titre, 1971, acrylique sur papier, offre, quant à elle, des dominantes de rouges et de bleu marine. Elle évoque une recherche de musicalité, d’équilibre et de spontanéité. Selon Schneider : « Il faut voir la peinture abstraite comme on écoute la musique, sentir l'intériorité émotionnelle de l'œuvre sans lui chercher une identification avec une représentation figurative quelconque. Ce qui est important, ce n'est donc pas de voir l'abstrait, c'est de le sentir. […] ». Cette œuvre sur papier montre toute la sincérité et la candeur de la démarche esthétique de Schneider, en une composition à la fois tempétueuse et harmonieuse. Les coups de pinceau, témoins de l’état intérieur de l’artiste, retranscrivent son tumulte interne en une symphonie colorée.




Trois toiles de Lanskoy à l’encan
Peintre russe de la nouvelle école de Paris, André Lanskoy (1903 – 1976) produit des peintures reconnaissables à leurs couleurs particulièrement vibrantes. Autodidacte, il passe, entre 1935 et 1941, de la figuration à l’abstraction. À cette période les formes deviennent, sous son pinceau, des taches colorées. Tout en justesse, l’œuvre de Lanskoy se caractérise par une grande variété. L’artiste produit des gouaches, des huiles ou encore des illustrations de livres, des tapisseries et des mosaïques.

Estimée 50 000 / 80 000 euros, cette toile de 1959 illustre sa recherche de l’abstraction. Se débarrassant de toute forme physique reconnaissable, l’artiste ne conserve que la couleur comme moyen d’expression picturale. Enchaînant les coups de pinceau d’apparence désordonnés, son style « tachiste » aurait été fortement influencé par Nicolas de Staël, peintre dont Lanskoy était très proche.





André Lanskoy (1902-1976)
Ni rêve ni réalité, 1959
Huile sur toile, signée en bas à droite, titrée et datée au dos
66 x 82 cm
Un certificat d'authenticité de Monsieur Angelo Pittiglio, en date du 8 décembre 1989, sera remis à l'acquéreur.
Provenance
Galerie Pittiglio, Paris.
Collection privée, Paris.
Estimation: 50 000 - 80 000 €




Deux autres toiles datant des années 60, Les soucis des insouciants et Vague souvenir, estimées chacune 70 000 / 100 000 euros et 60 000 / 80 000 euros, devraient également retenir l’attention des amateurs.



La scène asiatique
Cette vacation dédiée à l’art contemporain fait également la part belle aux artistes asiatiques, parmi lesquels Chu Teh-Chun ou encore Kim Tschang-Yeul.




Chu Teh-Chun (1920-2014)
Sans titre, 1979
Huile sur toile, signée en bas à droite, contresignée, dédicacée et datée au dos
46 x 61 cm
Un certificat d'authenticité de la Fondation Chu Teh-Chun sera remis à l'acquéreur.
Provenance
Offert par l'artiste puis par descendance.
Estimation:  160 000 - 250 000 €




Chu Teh-Chun (1920-2014) demeure l’un des grands maîtres de l’abstraction lyrique. Inédite, cette œuvre, qui date de 1979, évoque sa fameuse série des neiges. Paysagiste de l’abstrait, Chu Teh-Chun s’éprend des montagnes françaises, dès le milieu des années 1960, et s’attèle dès lors à en dépeindre toute la complexe beauté. Cette toile évoque un paysage montagneux hivernal, tout en falaises et en reliefs. Le blanc représente une majeure partie de la surface, et les teintes bleutés évoquent des reflets glacés de la neige. Né en 1920 dans la province du Jiangsu, Chu Teh-Chun se forme à l’académie des Beaux-Arts de Hangzhou où il découvre un art hybride, entre orient et occident. Formé dès ses premières années à la calligraphie et à la poésie classique chinoise, il porte pourtant son dévolu sur les toiles de Cézanne, Degas et Matisse, qui le fascinent et l’influencent le plus.





Kim Tschang-Yeul (1929-2021)
Gouttes d'eau, 1973
Huile sur toile, signée et datée en bas à droite, signée, titrée, datée et portant le cacher de la galerie Thot à Avignon au dos sur le châssis.
50 x 50 cm
Provenance
- Galerie Thot, Avignon, 1973
- Collection privée, France
Exposition
« KIM Tschang-Yeul », Galerie Thot, Avignon, 1973
Estimation: 30 000 - 50 000 €




Artiste d’importance, Kim Tschang-Yeul fait partie des grandes figures de l’art ayant contribué au renouveau de la scène artistique coréenne contemporaine. Son grand-père l’initie à la calligraphie des idéogrammes, et cet art irriguera son travail durant toute sa carrière. Né en 1929 dans l’actuelle Corée du Nord, Kim se rend en France où il s’installera définitivement en 1969, après avoir visité New York en 1965. C’est au début des années 1970 que Kim Tschang-Yeul utilisera le thème de la goutte d’eau, distinctif et représentatif de son œuvre. Datée de 1973 et inédite sur le marché des enchères, la toile proposée le 6 avril 2023 par Aguttes s’intitule Gouttes d’eau et présente ses célèbres gouttes d’eau si réalistes. Particulièrement intéressante de par son format intimiste et sa date, cette œuvre fait partie des premières toiles de la série des gouttes. Quintessence de son œuvre, ces gouttes se verront déclinées sur divers supports et sous différentes formes pendant plus de 40 ans. Ce motif non seulement ne masque pas son support mais le sublime. Véritable trompe-l’œil, il dégage une certaine fragilité et revêt un aspect à la fois précieux et instable. Il crée l’illusion que le moindre geste pourrait le faire disparaître et constitue ainsi une trace du temps qui passe.



Deux autres lots-phares
Pont entre l’Orient et l’Occident, l’œuvre de Fabienne Verdier. Héritière des derniers grands calligraphes chinois, cette artiste se forme à Chongqing dans le courant des années 1980, après les Beaux-Arts de Toulouse. Entre modernité et tradition, elle crée un univers qui n’appartient qu’à elle, un travail qui évoque une forme d’absolu et d’universalité. Son intervention sur la toile ne constitue alors qu’une transition qui permet de passer d’une manifestation physique à une production métaphysique.




Fabienne Verdier (née en 1962)
Cercle - Ascèse, 2012,
Encre, pigments et vernis sur toile tendue sur panneau, signé et titré au dos
183 x 135 cm
Un certificat d'authenticité signé par l'artiste sera remis à l'acquéreur.
Provenance
Art Plural Gallery, Singapour
Collection privée, Suisse
Estimation: 80 000 - 120 000 €



Tel le derviche tourneur, dont la danse aux mouvements concentriques amène à la transe, le mouvement circulaire que l’artiste effectue, pour produire ce cercle, évoque une réflexion profonde et personnelle. Symbole d’unité et d’infini, le cercle illustre la perfection naturelle et l’absolu. Dans Cercle – Ascèse, le cercle reste ouvert et inachevé. Ainsi brisé, il offre un univers de possibilités : un monde qui n'est pas fermé mais au contraire tourné vers l'extérieur. Il représente un esprit en conversation avec les énergies qui l'entourent, en connivence avec la nature et avec autrui.

Très tôt, Ladislas Kijno (1921 – 2012) fréquente l’atelier de Germaine Richier, qui l’encourage dès 1954 à se consacrer à la peinture. À la frontière entre abstraction lyrique et expressionnisme abstrait, le travail de Kijno s’inspire d’éléments du réel, que le peintre traduit par des traits et des formes simples, dans des compositions abstraites.




Ladislas Kijno (1921 - 2012)
Sans titre, 1977
Polyptyque de cinq huiles sur bois, signé en bas du dernier panneau,
150 x 50 cm (chacun)
Provenance
Collection privée, Montpellier
Estimation: 30 000 - 50 000 €



Composée de 5 panneaux répétant les mêmes motifs en différentes déclinaisons de couleurs, cette huile sur bois monumentale constitue très certainement la plus grande œuvre connue de cet artiste.





ART CONTEMPORAIN

Vente aux enchères
Le jeudi 6 avril 2023 à 16h
Aguttes Neuilly

Exposition privée 
Dès maintenant sur rendez-vous 

Exposition publique

Du 3 au 5 avril 2023 de 10h à 17h
Le 6 avril 2023 de 10h à 13h



Directeur et expert du département Art contemporain
Ophélie Guillerot
+33 1 47 45 93 02 • guillerot@aguttes.com