LOUYSE MOILLON PARIS, 1609/1610-1696

Lot 27
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Estimation :
800000 - 1200000 EUR
LOUYSE MOILLON PARIS, 1609/1610-1696
Nature morte au panier de quetsches Huile sur panneau 47,9 x 39 cm PROVENANCE Collection privée française. Le docteur Dominique Alsina a confirmé l'authenticité de l'oeuvre. Il sera l'auteur d'un texte qui fera l'objet d'un tiré-à-part en marge du catalogue. Les fruits encore tous veloutés de leur cueil - lette récente débordent d’un panier d’osier posé sur une planche de bois brut : gorgés de la chaleur d’un été finissant, le butin de la gla - neuse nous fait envie autant qu’il nous émerveille. Préservées du dehors, les quetsches présentent les stigmates de leur vie au grand air. Ça-et-là, nos yeux tombent sur la chair d’un fruit entamée par les oiseaux, sur des percées dans les feuilles attestant du passage de quelques insectes ou sur les bouts arrachés d’une branche qui aura ployé facilement sous le poids de son butin. Les formes sont pleines, rondes, imposantes. Et pourtant Louyse Moillon très habilement, allège la composition de diverses manières. Astucieusement, elle dérobe à son panier un fruit qu’elle ouvre en deux, place au premier plan, s’en servant de repoussoir pour agrandir l’espace ; elle crée de minuscules percées dans les feuilles et emmène nos yeux au-delà du motif ; les espaces laissés entre les rubans d’osier, aussi sobres et sombres que le fond, laissent l’air circuler. Par son jeu de lumière venue de la gauche, elle crée un clair-obscur et construit un espace simple que ne composent qu’une table et un fond neutre indéfini. Finalement, la lumière dorée fait émerger les fruits de l’obscurité, permettant à l’artiste de jouer de toutes les nuances de sa palette restreinte. Une chaude luminosité se pose ainsi sur la peau des quetsches dont elle s’amuse à en révéler toutes les nuances. Frottée par la main qui les a cueillies, la pellicule veloutée qui les protège naturellement s’efface par endroits. Entre jaune et violet, les touches de rose et d’orangé viennent faire une habile liaison, rappelant les nuances d’un ciel de fin de journée auquel elles ont été soustraites. Le motif de la prune est récurrent dans l’œuvre de Louyse Moillon (Fig. 1-2). Seules ou accompagnées, elles ont été un sujet de prédilection pour l’artiste. Née à Paris au tout début du XVII e siècle, Louyse est la fille de Nicolas (c. 1580 - 1620), peintre déjà bien intégré au cercle des artistes parisiens. Natif des Ardennes, il arrive à Paris vers la toute fin des années 1590 et s’installe à Saint-Germain-des-Prés où il exerce quelque temps avant d’entrer dans l’Académie de Saint-Luc et de déménager vers le pont NotreDame. Lorsqu’il meurt en 1620, la jeune fille n’a qu’une dizaine d’années et s’il a pu commencer  à lui enseigner l’art de la peinture, c’est son beau-père François Garnier, peintre de natures mortes, qui prend le relai auprès d’elle. Il fut très vraisemblablement, une influence déterminante dans la construction de son identité artistique. Peintre protestante, l’artiste a été profondément influencée par la tradition des natures mortes flamandes et hollandaises contemporaines. Celle-ci s’était particulièrement diffusée à Paris lorsque toute une communauté de peintres septentrionaux est venue s’installer sur les rives de la Seine, permettant aux peintres locaux de les copier et de s’approprier leurs techniques. À l’instar de ce que l’on peut voir dans les tableaux nordiques, se remarquent déjà dans sa production une grande sobriété de l’agencement, un dépouillement extrême et une forme de rigueur janséniste. De même les couleurs, plus chaudes que vives, semblent se plier à ce que le dogme protestant préconisait sous l’égide de Calvin qui avait-lui-même théorisé leur emploi ainsi que la spatialité des compositions. Sans jamais céder à la superficialité, les peintres devaient ainsi se tenir sobrement à la représentation de l’objet ainsi que Dieu l’avait créé. Créateur de vie, il serait alors dommage de parler de « nature morte » pour ces fruits délicieusement charnus. Au terme français en vigueur depuis le milieu du XVIII e siècle, il serait plus intéressant de s’en tenir aux expressions antérieures de « nature reposée » et « nature silencieuse ». Les langues anglaise comme hollandaise, ont judicieusement choisi de préserver cette tournure, les désignant comme « Still-Life » et « Stilleven ». Gorgés de vie, les quetsches de Louyse Moillon invitent davantage à la contemplation qu’elles ne nous poussent à quelque considération symbolique. Choisis pour la beauté de ce qu’ils sont, les fruits sont magnifiés par un pinceau qui les admire et les traite avec poésie.
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