FLAUBERT Gustave (1821-1880).

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FLAUBERT Gustave (1821-1880).
MANUSCRIT autographe, Pyrennées & Corse (22 août - 1er novembre 1840) ; 276 pages petit in-4 (21,5 x 17,5 cm) sous chemise autographe ; emboîtage moderne demi-maroquin noir. Précieux manuscrit complet du premier récit de voyage de Flaubert, à l'âge de dix-neuf ans. Un peu moins de trois semaines après son baccalauréat ès lettres, passé en candidat libre, le 3 août 1840, Gustave Flaubert, âgé de 19 ans, part en voyage dans les Pyrénées et en Corse en compagnie du professeur Jules Cloquet, un ami de son père, « grave et savant compagnon ». Il va rédiger pendant ce périple qui va durer plus de deux mois, et de retour à Rouen, un récit divisé en trois grandes sections : Bordeaux, Marseille et Corse. L'itinéraire peut être ainsi reconstitué. Rouen, Paris, Longjumeau, Montlhéry, Blois, le Poitou (« pays de bœufs »), Bordeaux (longuement visitée, dont la bibliothèque où il touche « avec autant de vénération qu'une relique » l'exemplaire corrigé de Montaigne), Dax, Bayonne, Biarritz (où il se jette dans la mer déchaînée pour porter secours à des noyés), Béhobie, Fontarabie (« j'ai vu l'Espagne, j'en suis fier et heureux »), la Madalena, Irun, Pau, Lourdes, Argelès, Eaux-Chaudes, Saint-Savin, Cauterets (le Pont d'Espagne et le lac de Gaube), cirque de Gavarnie, Bagnères-de-Luchon (15 septembre), Saint-Bertrand-de-Comminges, port de Vénasque, Toulouse, canal du Midi et Saint-Ferréol, Carcassonne, Narbonne, Nîmes, le Pont du Gard, Arles, Marseille, Toulon d'où il embarque (4 octobre) pour la Corse ; Ajaccio, Sagone, Vico, Guagno, Ajaccio, Bocognano, Vizzavona, Ghisoni, Isolaccio, Corte, Piedicroce, Bastia, où l'on embarque pour regagner la France ; Toulon, Marseille... Flaubert, passionné par l'Antiquité et l'histoire médiévale, décrit les monuments qu'il visite, mais aussi les villages et les sites pittoresques ; il relate avec verve les différentes péripéties du voyage et les rencontres, évoque avec émotion et enthousiasme sa découverte de la Méditerranée et de ses couleurs, s'intéresse aussi aux mœurs et coutumes des habitants des régions traversées, avec notamment tout un développement sur les bandits corses... Mais on remarquera surtout un ton très personnel, où l'expression du moi et des impressions ressenties l'emporte sur la simple relation. Un futur écrivain est en train de naître, comme le montre le tout début du récit : « Il y a des gens qui la veille de leur départ ont tout préparé dans leur poche : encrier rempli, érudition placardée, émotions indiquées d'avance. Heureuses et puériles natures qui se jouent avec elles-mêmes et se chatouillent pour se faire rire comme dit Rabelais. Il en est d'autres au contraire qui se refusent à tout ce qui leur vient du dehors, se rembrunissent, tirent la visière de leur casquette et de leur esprit pour ne rien voir. Je crois qu'il est difficile de garder ici comme ailleurs le juste milieu exquis préconisé par la sagesse - point géométrique et idéal placé au centre de l'espace, de l'infini de la bêtise humaine. - Je vais tâcher néanmoins d'y atteindre et de me donner de l'esprit, du bon sens & du goût, bien plus, je n'aurai aucune prétention littéraire et je ne tâcherai pas de faire du style - si cela arrive que ce soit à mon insçu comme une métaphore qu'on emploie faute de savoir s'exprimer par le sens littéral, je m'abstiendrai donc de toute déclamation et je ne me permettrai que six fois par page le mot pittoresque et une douzaine de fois celui d'admirable. Les voyageurs disent le premier à tous les tas de caillous et le second à toutes les bornes il me sera bien permis de le stéréotyper à toutes mes phrases qui pour vous rassurer sont d'ailleurs fort longues. Ceci est un préambule que je me suis permis et qu'on aurait pu intituler le marche pied pour indiquer les émotions que j'avais en montant en voiture ce qui veut dire que je n'en avais aucune. Je m'assassinerais si je croyais que j'eusse la pensée de faire ici quelque chose d'un peu sérieux. Je veux tout bonnement avec ma plume jeter sur le papier un peu de la poussière de mes habits. Je veux que mes phrases sentent le cuir de mes souliers de voyage et qu'elles n'aient ni dessus de pieds ni bretelles ni pommade qui ruissèle en grasses périodes ni cosmétique qui les tienne raides en expressions ardues mais que tout soit simple franc et bon, libre et dégagé comme la tournure des femmes d'ici avec les poings sur les hanches et l'œil gaillard le nez fin s'il est possible et avant tout point de corset mais que la taille soit bien faite. Cet engagement pris me voilà lié moi-même et je suis forcé d'avoir le style d'un honnête homme. / La campagne de Paris est triste, l'œil va loin sans rencontrer de verdure, de grandes roues qui tirent les pierres des carrières, un maigre cheval flanqué d'un petit âne tirant des tombereaux de fumier, du pavé, le cliquetis des glaces et cet indéfinissable vide d'esprit qui vous prend aux moments du départ voilà tout ce que j'ai vu, voilà tout ce que j'ai s
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