CLAUDEL Paul (1868-1955).

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CLAUDEL Paul (1868-1955).
9 L.A.S. « P. Claudel », 1919-1927, à l'abbé Jacques DOUILLET ; 30 pages formats divers (plusieurs à en-tête), 6 enveloppes et une adresse (quelques défauts, la 1ère lettre entièrement coupée aux pliures). Belle et riche correspondance avec un jeune prêtre, où Claudel évoque et commente ses œuvres. [L'abbé Jacques DOUILLET (1893-1974), alors sous les armes et jeune séminariste, a écrit à Claudel le 10 mai 1919 pour dire son admiration, notamment pour L'Otage qui a semé le trouble chez lui, et s'interroger sur le sacrifi ce de Sygne. C'est le début d'une correspondance entre l'écrivain et le jeune prêtre qui va durer huit ans. Dans son Journal, Claudel ne mentionne pas l'abbé Douillet, bien qu'il reconnaisse ici avoir trouvé en lui « l'aide sacerdotale » qui lui manquait depuis la mort de l'abbé Fontaine. Nous ne pouvons donner ici qu'un aperçu de ces lettres, parfois fort longues.] Copenhague 24 septembre 1919. Claudel rassure Douillet sur ses inquiétudes : « Vous n'êtes pas le seul que la lecture de L'Otage ait troublé, intrigué, pour ne pas dire scandalisé. Dernièrement, j'ai été attaqué avec une violence inouïe par un jésuite de Montréal qui m'a accusé d'avoir fait une attaque dangereuse et perfi de contre la foi catholique !! [...] En résumé Sygne se sacrifi e : 1° pour sauver le Pape 2° pour sauver son hôte et laver son cousin des crimes qu'il a commis par un acte monstrueux de violence d'injustice et de témérité (sentiment antique et féodal) 3° par orgueil (le mauvais sang). [...] Je n'ai pas voulu représenter une Sainte mais la victoire de la Grâce sur l'Orgueil. J'ai été entraîné non pas par une idée préconçue mais par une certaine logique artistique »... 1er novembre (Douillet s'étant interrogé sur l'obscurité de certaines pages de Claudel). « Peut-être Le Pain dur vous paraîtrait-il plus clair si je lui avais laissé l'un des titres que j'avais choisis d'abord ‘les Possédés' ou “l'Étrangère” [...] J'ai voulu montrer une société dont Dieu s'est retiré [...] Il y a du vrai dans ce que vous me reprochez sur l'impression de trouble, d'inquiétude que laissent mes livres. Et cela en eff et est en partie voulu. Je ne veux pas que le lecteur se retire repu et satisfait, mais qu'il emporte avec lui un aiguillon et un ferment. [...] Je ne suis pas un saint ni un moine. Je suis un homme du monde et un poète, essayant de faire son salut au milieu d'une quantité de passions, de tentations et de batailles ; la Grâce se montre à moi non pas seulement comme un principe de lumière, mais comme un principe de lutte, de violence, de purgation lente et diffi cile, dans un milieu réfractaire provoquant des réactions redoutables »... 16 novembre 1921, « en mer devant les côtes du Japon ». Il livre à l'abbé ses préoccupations, la maladie de son petit garçon, et revient sur l'apparente obscurité de son œuvre. « Je traverse un moment de dégoût et de tristesse, et je me pose de nouveau cette question que je m'adressais bien souvent : à quoi bon ? Pourquoi écrire ? Pourquoi tous ces livres qui sont utiles à si peu de gens et dont la fabrication m'a arrêté sur la voie de la perfection ? »... Tokyo 10 mai 1922. Très longue lettre (8 pages in-4) sur son œuvre. « Je pourrais dire d'abord qu'une bonne partie de mes œuvres est parfaitement claire. Il me semble que l'Annonce, l'Otage même, le Pain dur, les Corona, Protée, Connaissance de l'Est sont accessibles à tous. Mais j'aime mieux être franc et j'avoue que même mes ouvrages les plus clairs doivent laisser dans l'esprit du lecteur une sourde inquiétude, le sentiment qu'il n'a pas épuisé le livre, que l'auteur ne s'est pas laissé parfaitement posséder [..] Il y a tout d'abord les raisons purement extérieures, superfi cielles, verbales. Je passe sur la forme du vers qui ne peut choquer que les pions. Il y a, en outre, les sautes brusques d'idées, les changements soudains d'atmosphère, provoqués par des images juxtaposées, sublimes et triviales. Mais pour moi tout est bon qui sert à m'exprimer. [...] La véritable pensée chrétienne est que toute œuvre de Dieu est non seulement bonne, mais très bonne, non seulement par rapport à nous qu'elle recrée, mais par rapport à Dieu qu'elle signifi e, et de même que son utilité matérielle résulte du travail de notre corps sa signifi cation salutaire résulte de l'inquisition de notre esprit ».... 24 janvier 1923. Claudel avoue être « profondément dégouté de la littérature. Vous savez sans doute qu'il y a une vingtaine d'années j'ai voulu entrer au monastère de Ligugé. J'ai une espèce d'espoir et de prémonition que le Bon Dieu ne me laissera pas crever comme un bourgeois dans le bien-être et la paresse »... 5 et 10 mai 1925, Claudel, en séjour à Grenoble puis à Paris, regrette de n'avoir pu rencontrer l'abbé Douillet. Paris 19 août 1927. « Quand je me regarde moi-même et que je vois la proportion d'eff orts honteusement minimes que j'ai faite et ce que je dois aux aff ectations de toute nature qui m'ont entour
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