BARBEY D'AUREVILLY JULES (1808-1889)

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BARBEY D'AUREVILLY JULES (1808-1889)
L.A.S. «J.B. d'Aur.», Bourg-Argental 17 novembre 1846 «dans la nuit, - sur une table d'auberge entre deux bougies qui s'ennuient de brûler», à son ami Guillaume-Stanislas TRÉBUTIEN ; 6 pages in-8 (onglet sur un bord, infime déchirure au bas du dernier feuillet affectant la signature). Très belle et longue lettre sur son voyage et sur Une vieille maîtresse. Il est à Bourg-Argental [qui sera plus tard le décor d'Une histoire sans nom], «une bourgade féodale qui n'a pas plus que des ruines, au fond d'une noire vallée, enceinte de hautes montagnes, - les premiers anneaux de l'imposante chaîne des Cévennes. C'est là que Mon errante Majesté réside pour l'instant. Si j'en ai la fantaisie, je peux m'y croire au bout du monde». Et il compare sa situation au roman de Walter Scott L'Antiquaire... Mais il n'est pas là «pour quelque femelle», mais pour une affaire, «pour entraîner des intérêts d'argent, plus difficiles à entraîner, - avec nos diables de mœurs avides, sordides et putrides - que des intérêts politiques. Cependant j'ai à peu près réussi. [...] l'affaire est vaste et demande autant d'activité que d'habileté de main, de persévérance et de coup d'œil. Elle doit nous mener à la fortune. Je dis nous, car nous sommes Treize dévorants, comme dans Balzac, non l'épistolier, mais l'autre. [...] Vous êtes dans toutes mes ambitions, comme moi-même, et l'amitié a des idées fixes comme l'amour». Barbey raconte son voyage qui a été «comme un drame de Skakspeare, tour à tout grotesque et terrible. Grotesque, car j'ai voyagé, grâce aux inondations et à l'interruption de tout service de poste, comme on voyageait il y a soixante ans par le coche [...] Terrible, car j'ai vu d'effroyables désastres. Cette Loire que vous rêvez et qui coulait au soleil comme une femme sourit sous des lustres [...], est devenue une vraie furie. [...] J'ai passé sur des routes arrachées ; j'ai vu flotter des populations de cadavres et fuir dans les campagnes des populations de vivants comme si l'ennemi était à nos portes. [...] La Dévastation m'a suivi jusqu'à St Etienne, une vraie ville anglaise ou américaine par parenthèse, noire brumeuse, charbonnée, mais bien bâtie, avec les plus beaux et les plus aristocratiques hôtels pour les voyageurs. [...] la France ne vaut pas la peine qu'on voyage parce qu'elle n'offre rien qui interrompe assez fortement vos impressions & vos souvenirs»... Il ira probablement à Lyon, puis à Genève : «J'aimerais à dater des bords du lac Léman la dernière page de Vellini [Une vieille maîtresse]. Cette pauvre Vellini ! Je l'ai continuée sur toutes les tables d'auberge des villes et même des villages par lesquels je suis passé. The Wandering Book ! [...] Mon 2e volume s'avance beaucoup. [...] Si ce fabuleux Hypogriffe, le succès peut être chevauché, nous le chevaucherons et que Dieu me damne ! Je ferai de lui et de moi un vrai centaure ! Du reste si cela n'est pas, mon deuil ne sera pas long. De toutes les gloires, la gloire livresque n'est pas celle qui me tente le plus. Quelque soit le sort de Vellini, elle m'aura assez servi puisque je l'aurai écrite. Elle m'aura arraché à moi-même. C'est le plus beau profit de ces livres que nous sortons de nos esprits. J'écrivais il y a quelques jours à une femme restée mon amie : “C'est un portrait et c'est un rêve que Vellini. Le portrait de qui ? Le rêve de quoi ? C'est ce que le monde ne saura jamais, pas même vous. Un doute peut-être, mais rien de plus !! J'ai éprouvé en l'écrivant ce qu'une femme éprouve en caressant sa chimère si sa chimère était plus qu'un mensonge, mais une vivante réalité”. Et cependant tout n'est pas chimère dans ce livre»... Il ne pense pas être avant la première huitaine de décembre «dans notre très aimé et très corrompu Paris» ; il donne des nouvelles de leur ami Gaudin
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