La revue
LE PETIT GUIDE DU JEUNE COLLECTIONNEUR PAR OPHÉLIE GUILLEROT



Par où commencer sa collection d’art contemporain ? Comment choisir ses œuvres et ses artistes ? Où acheter ? Ais-je ma place dans une vente aux enchères ? Nous allons essayer de répondre ici à ces questions (et peut-être même quelques autres encore), tout en offrant un panorama de ce qu’être collectionneur peut bien vouloir dire aujourd’hui.



Mais pour commencer, un peu de sémantique : C’est quoi, une œuvre d’art ?
L’œuvre d’art est un concept profondément humain qui change à mesure que les époques se succèdent et il est complexe d’en offrir une définition universelle. Cet exercice, Emile Zola s’y livre en 1866 lorsqu’il écrit : « Ma définition serait, si je la formulais : Une œuvre d'art est un coin de la création vu à travers un tempérament »

En se basant sur cette définition, l’œuvre d’art peut alors être décrite comme le produit de l’individualité créative de l’Homme, transcrite sous forme physique à l’aide de techniques plus ou moins variés. Influencée par le vécu, les gouts, et la société entourant l’artiste, elle n’existe que pour elle-même et n’a de valeur que celle qu’on lui attribue subjectivement.

Ceci était dit, et en prenant un point de vue un peu plus concret, l’art a également su s’imposer comme un investissement refuge, qui, malgré les crises et les changements sociaux-politiques, reste une valeur sûre. Acheter de l’art contemporain est un choix stratégique, qui demande au collectionneur de posséder d’ores et déjà quelques notions de goût ainsi qu’un attrait pour le milieu de l’art, des qualités qui s’aiguisent bien évidemment avec le temps et l’expérience. La bonne nouvelle étant qu’il s’agit d’un investissement accessible à tous les budgets, tous les goûts, et qui peut vite devenir aussi passionnant que rentable !

Maintenant que les bases sont posées, vient la grande question : Que faut-il acheter, et pourquoi ?
Pour débuter une collection je conseille toujours d’acheter ce qui nous plait tout en diversifiant, et en alternant entre achat en galerie et achat en maison de vente. Je dis ce qui nous plait car je pense qu’il faut réfléchir sur du long terme. Il n’y a pas de règle dans le collectionnisme, même si beaucoup aiment conserver une ligne directive, un thème, autour duquel les achats vont s’articuler. On peut aussi choisir de collectionner en premier lieu des œuvres sur papier, ou des multiples qui sont en général plus abordables pour ensuite aller vers d’autres techniques. Beaucoup des collectionneurs avec qui j’échange régulièrement changent de goût au bout d’un certain temps et décident de vendre les petites pièces du début pour acquérir des œuvres plus importantes.

A mon avis, en premier lieu, il faut regarder la qualité de l’œuvre. Sa technique, son année de création, sa provenance et son historique d’expositions et de publications. Il faut s’informer sur la carrière de l’artiste, regarder si celui-ci est représenté par une galerie, si ses œuvres sont dans des musées, des institutions ou des collections. Enfin il faut regarder son prix et le comparer aux résultats déjà existants, tout en prenant en compte l’évolution de la cote de l’artiste.

Je pense que, dans le cadre d’une collection d’art contemporain, il est important de diversifier ses achats. Cela permet d’avoir dans sa collection des œuvres d’artistes qui ont déjà une cote, et qui peuvent représenter un investissement plus sûr, tout en promouvant la création de plus jeunes artistes.

S’il est important de savoir ce que l’on veut acheter, encore faut-il oser pousser les portes. Jeunes collectionneurs, ne craignez plus les maisons de ventes ! On vous explique.

Les maisons de ventes aux enchères représentent essentiellement le second marché. Elles sont à mon avis très bien adaptées aux non-initiés car elles sont publiques et donc accessibles à tous. Toutes les informations sont données dans le catalogue de la vente avec la fourchette d’estimation qui donne déjà une idée de prix à l’enchérisseur. Même si, évidemment, le prix marteau final peut dépasser cette fourchette !

Dans notre vente de novembre, par exemple, nous avions de très belles œuvres de Georges Mathieu, Olivier Debré et Shirley Jaffe qui se sont vendues entre cinquante-mille euros et plus d’un million deux-cent-mille euros ttc ; un très beau chiffre atteint par une petite toile de Pierre Soulages, la première vendue après sa disparition. Nous avions également, une belle collection que nous vendions en « capsule » dans le catalogue, dont les estimations allaient de six-cent euros à quatre-cent-mille euros. Enfin, j’ai ajouté une section « jeunes collectionneurs » à mes ventes depuis un an. J’y présente de jeunes artistes parfois non cotés, des œuvres sur papier ainsi que des multiples, l’occasion pour les nouveaux acheteurs de se lancer à moindre coût, ainsi que pour nous de présenter des choses qui nous plaisent et que nous voulons promouvoir.

Il est important que les ventes aux enchères changent de peau, et se diversifient ; que notre audience, autant que les lots que nous proposons, soit variée. À la fois jeune et amatrice, mais aussi connaisseuse et expérimentée. De plus, depuis 2020, le digital a pris une grande place sur le marché des enchères. Cette accessibilité encore plus prononcée a fait venir de nombreux nouveaux acheteurs de tous horizons et de tous âges, de 20 à 70 ans !

Félicitations, vous avez passé le pas de la porte ! Maintenant, que faire, et à qui vous adresser ?
Mon conseil pour se familiariser avec les ventes aux enchères est de lire les catalogues des anciennes et futures ventes. Il faut savoir que les résultats de ventes sont publics et consultables sur les sites internet des différentes maisons. Il s’agit d’une très bonne base pour suivre les différentes cotes des artistes, voir leur évolution au cours du temps, et prévoir ses propres investissements. Il ne faut également pas hésiter à aller en salle, car c’est là que tout se joue ! La vente aux enchères reste un spectacle, une pièce de théâtre qui se réinvente à chaque nouvelle représentation, et c’est l’occasion de rencontrer d’autres collectionneurs, ainsi que des experts.

Mes conseils pour enchérir sur une œuvre d’art contemporaine sont de se rapprocher du spécialiste en charge de la vente et de se renseigner sur l’état de l’œuvre (en demandant par exemple des photographies complémentaires ou un rapport de condition), ainsi que sur les éléments qui ont permis de l’authentifier. Il ne faut pas hésiter à poser toutes vos questions au spécialiste. Il est là pour ça ! Son rôle est tout autant celui de conseiller les potentiels acheteurs et que les futurs vendeurs.

Enfin, comment éviter les pièges qui tapissent le chemin du jeune collectionneur ? Quelles sont les questions à se poser avant de se lancer ?
Lorsque que l’on enchérit, il faut bien prendre en compte les frais annexes qui s’ajoutent au prix marteau. Il y a les frais acheteurs d’environ 30%ttc en vente volontaire (et de 14,4% en vente judiciaire), les frais de transport, de douane si l’œuvre est en importation temporaire, le droit de suite selon les études etc. sont à la charge de l’acheteur et du vendeur, l’étude n’est qu’un intermédiaire entre les différentes parties !

En France les collectionneurs sont très bien protégés lorsqu’ils achètent en vente, le délai de prescription est de 5 ans à compter de la découverte du défaut, dans un délai butoir de 20 ans. Il ne faut pas hésiter à se renseigner sur la législation qui entoure l’achat, la possession, et la revente de patrimoine artistique et culturel.

Par ailleurs, je conseille d’avoir le réflexe d’aller voir une œuvre lorsqu’elle est exposée en avant-vente si on le peut, et, le cas échéant, de demander systématiquement un rapport de condition pour éviter les mauvaises surprises. Je le dis à nouveau mais il faut bien garder à l’esprit que nous sommes là pour guider les vendeurs et acheteurs à travers tout ce processus et nous proposons également des expertises gratuites et confidentielles.




Prochaine vente 
Le jeudi 14 septembre 2023
Aguttes Neuilly

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Ophélie Guillerot
+33 1 47 45 93 02
guillerot@aguttes.com