La Revue
NU DE TROIS QUARTS DANS L'ATELIER
UN HYMNE À LA COULEUR COMPOSÉ PAR HENRI MANGUIN EN 1916




Le 1er août 1914, l’Europe bascule dans la guerre. Dès le mois de septembre, Henri Manguin reçoit son ordre de mobilisation mais il est très vite réformé. Félix Vallotton aide alors le peintre et sa famille à trouver refuge à Lausanne.

Fidèle à ses thèmes de prédilection, Manguin y brosse de grands bouquets de fleurs et des nus, sa femme Jeanne se prêtant toujours de bonne grâce aux longues séances de pose en intérieur. Nu de trois quarts dans l’atelier la représente de dos, la tête de profil à demi-dissimulée par son bras, dans un coin de l’appartement de la rue de Rumine qui fait alors office d’atelier. Devant elle, se tient une chaise en rotin prise en étau entre un divan vert sur lequel sont jetés pêle-mêle ses vêtements et un grand rideau à décor imprimé. Jeanne, debout sur un tapis garance, vient à peine de se déshabiller car sa chemise blanche est encore roulée en boule à ses pieds.

Comme Bonnard avec Marthe, elle est le modèle quasi-permanent de Manguin. Et si elle se dresse en majesté au centre du tableau, elle se voit cependant disputer la vedette avec l’Indienne servant de rideau. Gonflé par la brise, le textile dicte son geste au modèle : celui d’une frileuse qui cherche à se protéger du froid ou d’une Vénus pudique qui chercherait à se dérober au regard des curieux.






HENRI MANGUIN (1874-1949)
Nu de trois quarts dans l'atelier, 1916
Huile sur toile
Signée en bas à gauche
116 x 89 cm



L’ivresse du peintre face à sa muse et à son environnement se traduit par l’usage d’une palette de teintes vives qui colonisent tout l’espace disponible du champ pictural : du sol aux murs en passant par la chevelure et la courbure du dos de Jeanne qui se parent de couleurs non imitatives à l’instar du bleu et du gris-vert, autant de réminiscences du passé fauve de Manguin.

Parmi les nus peints autour de 1916, Nu de trois quarts dans l’atelier tient une place tout à fait exceptionnelle par son format, la richesse de sa composition et sa puissance chromatique. C’est peut-être parce que, resté dans la famille de l’artiste jusqu’en 1949, il a été un objet d’attention constant pour le peintre qui a seulement paré le rideau de ses motifs imprimés dans un second temps. En atteste, une photographie ancienne conservée dans les archives familiales.

Ce tableau, acquis par son actuel propriétaire au début des années 1980, figurera dans la vente notre prochaine vente d'art impressionniste et moderne.





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Pierre-Alban Vinquant
Directeur du département Art impressionniste & moderne
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